“Je suis humoriste. Donc, officiellement, je suis payé pour dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas... mais avec un micro et un sourire.”
Né un 12 août – un jour où même les moustiques faisaient grève à cause de la chaleur – Dongou Zidane, de son vrai nom Zidane Moukoukou Dongou, est un humoriste congolais né à Brazzaville et basé à Kinshasa. Il fait partie de cette génération d’artistes qui transforment les galères du quotidien en or comique. Son crédo ? Faire rire avec la vérité, et faire réfléchir sans endormir.
Les débuts : du rire en zone de guerre
Grandir à Makélékélé, ce n’était pas tous les jours comique… sauf pour lui. En 1997, pendant la guerre civile au Congo, pendant que d’autres enfants apprenaient à courir plus vite que les balles, Zidane apprenait à faire rire sa famille pour qu’on oublie qu’on dormait sous la table. Ce fut sa première scène. Pas de projecteurs, juste une lampe-tempête, des blagues bricolées avec des cuillères en plastique, et une audience très attentive : sa mère, ses sœurs, et une souris qui passait régulièrement.
“Je suis entré dans le métier parce que c’était ça ou psychiatre. Et honnêtement, j’avais pas les moyens d’aller jusqu’au doctorat.”
L’exil artistique : traverser le fleuve, traverser les styles
Adolescent, il quitte Brazzaville pour Kinshasa. Un choc culturel ? Pas vraiment. Le fleuve est large, mais les blagues, elles, traversent très bien. À Kinshasa, il découvre une ville bouillonnante, bruyante, imprévisible, parfaite pour un observateur du quotidien. Il tente des études à l’Institut National des Arts, mais abandonne quand il comprend qu’on n’y apprend pas à faire rire les gens sur les coupures d’eau et les files d’attente devant la REGIDESO.
Il commence alors dans l’underground kinois : mariages, funérailles, bars de fortune, scènes ouvertes où il partage le micro avec des chanteurs, des poètes et parfois des clients qui confondaient le stand-up et le karaoké.
Un style unique : satire, tendresse et punchlines
Dongou Zidane ne raconte pas des blagues : il déshabille les absurdités sociales avec élégance. Il parle politique, bien sûr, mais sans faire la morale. Il fait des imitations de ministres, de pasteurs, de policiers, de voisins trop curieux et de fonctionnaires trop fatigués. Sa spécialité ? Transformer une coupure de courant en parabole existentielle, ou une promesse électorale en sketch de science-fiction.
“La SNEL a coupé la lumière hier. J’ai crié : Alléluia ! C’était la première fois qu’ils faisaient preuve de constance.”
Son humour est populaire, intelligent et accessible. Il parle Lingala, Français, Kituba, mais surtout le dialecte universel : celui de la rue. Il est sarcastique sans être méchant, engagé sans être donneur de leçons. Il rit avec, pas contre.
De la scène au viral : le buzz au service des idées
En 2016, son spectacle à la Halle de la Gombe, écourté par une coupure électrique, devient culte. Il improvise en pleine obscurité avec les torches du public. Résultat : un sketch baptisé “Apocalypse SNEL”, vu des millions de fois sur Facebook.
Il lance ensuite des formats vidéo comme “Bandal Mentalité”, qui racontent la vie à Kinshasa avec des personnages hauts en couleur. En 2020, après une arrestation suite à un sketch jugé “trop réaliste pour être drôle” (dixit un policier), il rebondit avec “Cellule 9”, une série humoristique filmée à sa sortie de prison.
Une mission : rire pour libérer
Zidane le dit souvent :
“Je ne fais pas rire pour oublier. Je fais rire pour qu’on se souvienne mieux.”
À travers ses spectacles, il parle du quotidien, de la survie, de la politique, de la jeunesse sans repères, mais avec un regard bienveillant. Il aime le Congo, l’Afrique, les contradictions et la beauté de ses peuples. Il se moque, oui, mais toujours avec amour.
Ce qu’il prépare
Aujourd’hui, Dongou Zidane prépare de nouveaux spectacles, dont :
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“Ndoki de la République”, un show sur les malédictions politiques modernes
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“Pas de lumière, pas de mensonges”, une satire sur la gestion énergétique et les illusions collectives
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Et la tournée “Micro Trop Libre”, un projet panafricain de stand-up politique
Il rêve de fonder une école d’humour à Kinshasa, pour former les futurs comédiens du peuple. Parce que selon lui :
“On a assez de ministres. Il nous faut plus de gens pour les imiter correctement.”
Pourquoi venir le voir sur scène ?
Parce que le rire de Dongou Zidane, c’est celui du peuple, celui qui sait tout, voit tout, subit tout… et transforme tout en sketch.
Sur scène, ce n’est pas juste un spectacle. C’est une thérapie collective, un miroir, un soulagement. Et une promesse :
“Je ne résoudrai pas vos problèmes, mais je vous garantis qu’on va en rire ensemble.”